Pour ce nouveau rendez-vous, mes vacances au Maroc m'ont ispirée, quand vous lirez ce poème, j'y serais encore ! Voici donc "Entre le soleil et le silence" du poète marocain Mohammed Bennis. Il est né à Fès en 1948, il devient enseignant d'arabe, il publie ses premiers poèmes dès l'âge de 20 ans. Poète, traducteur, notement de la première version en arabe d'Un coup de dé de Mallarmé, éditeur et fondateur de la Maison de la Poésie au Maroc et contribue à moderniser l'accès à la culture. En 1998, il lance un appel à l'UNESCO pour instaurer une journée mondiale de la poésie, l'année suivante, l'UNESCO proclame le 21 mars comme Journée Mondiale de la Poésie.
Ses oeuvres ont été maintes fois primées, dans les pays du arabophones comme en Europe, la France l'a fait Chevalier des Arts et des Lettres en 2002, en 2006, il est élu Membre d'honneur de l'Association Mondiale de Haïku.
Si vous voulez en savoir plus, je vous invite à visiter son site internet, j'y ai trouvé le poème suivant ainsi que la photo !
http://mohammedbennis.com/mohammed_bennis_fr/index.php
Entre le soleil et le silence
1
Une fois encore j’ai posé mes mains
Sur toi j’ai posé mes paupières
De mon silence
à toi je reviens embelli par les amis
J’ouvre la porte d’en haut
Une soif me saisit
à lire l’onde des souffles dans le corridor du temps
2
Mes visions découvrent où commence le clin d’œil
Devant moi
deux proches du matin
un minaret éternité du vent
Une lumière verticale élargit les angles du balcon
L’écho de tes pas dans un pays qui fuit l’invisible
3
Par le plâtre et le zellige
la géométrie du mot retourne à l’origine
Une aube se lève dans cette gravure
et m’immerge dans l’eau du bassin
Jour après jour elle sème son roseau chantant
Point de parole hormis un cri de ravissement
4
Frère dans la mort
ta présence est ici
ton front le papillon des déserts l’a dispersé
Cette nuit est la nôtre
Nous suivons la courbe du soleil mérinide
Deux amoureux sortis des éloges
qu’inspira le ciel d’al-Andalus
Mes yeux fixèrent Averroès
éparpillant la poussière de l’âme
Nous reste une cour un plan d’eau
une élégie que nous accrochons sur nos murs
parure qui enivre les étrangers
5
La lumière touche mon front ou presque
Je cherche un encrier dans un coin éloigné
A l’entrée des mots
j’entends mon frisson s’approcher et s’en aller
D’un lieu secret viennent à moi
les croissants de la félicité
Dans leur rotation
les lettres calligraphiées parviennent à maturité
la clémence des formes entame sa déambulation
dans la durée de l’aube
Traduit de l’arabe par Abdelwahab Meddeb